18 octobre 2023
Depuis l’ère industrielle, avec le développement du secteur tertiaire et l’exploitation d’énergies fossiles, la température moyenne mondiale a augmentée de 1,2°C. Partant de ce constat, les dirigeants mondiaux se sont engagés lors de la conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP21) à Paris en 2015, à réduire considérablement les émissions mondiales de gaz à effet de serre. Le but est de limiter l'augmentation de la température moyenne mondiale au cours du 21ème siècle bien en dessous de 2°C au-dessus des niveaux préindustriels tout en poursuivant les efforts pour limiter cette augmentation à 1,5°C au-dessus des niveaux pré-industriels. L’initiative 4 pour 1000, initiée par la France à la COP21, recense des leviers d’actions pour augmenter de 4‰ (0,4%) par an le stock de carbone organique des sols. Ce chiffre résulte d’un calcul initial, considérant que l’ensemble des émissions annuelles de CO2 dues aux activités humaines représente actuellement, au niveau mondial, l’équivalent d’un quatre millième du stock de carbone des sols de la planète.
D’après le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (le GIEC), la séquestration du carbone dans les sols agricoles est la quatrième solution la plus importante pour lutter contre le réchauffement climatique. En effet le GIEC estime que les sols agricoles pourraient absorber de l’atmosphère et stocker ~3,4 gigatonnes de CO2e chaque année d'ici à 2030. L’implantation de couverts végétaux apparaît comme le levier principal pour la séquestration de carbone dans les sols agricoles. On vous explique tout cela en détail ci-dessous 👇
Les couverts végétaux sont des cultures intermédiaires. Elles ont pour vocation de ne pas être récoltées mais de couvrir le sol en interculture, la durée qui séparent deux cultures principales. L’interculture peut être courte ou longue.
Dans le premier cas, le sol est nu pendant une courte période (1 à 3 mois). Par exemple, si du blé tendre, récolté mi-juillet, est suivi par de l'orge d'hiver, semé début octobre, alors la durée de l’interculture est de moins de 3 mois. Cela permet d’implanter uniquement des espèces de couverts avec un cycle de développement rapide. Au contraire, dans le second cas, le sol est nu pendant une longue période de plusieurs mois (4 à 9 mois). Par exemple, si un blé tendre, récolté mi-juillet, est suivi par un tournesol, semé en avril/mai de l'année suivante, alors le sol est "à nu" pendant 8 à 9 mois. Cette longue période permet de semer un couvert végétal contenant des espèces avec un cycle de développement plus long.
L’implantation de couvert végétal est réglementée en fonction de la durée de l’interculture.
La Directive Nitrates rend obligatoire, seulement dans le cas d’intercultures longues en zones vulnérables, le fait de couvrir le sol avec des couverts végétaux. Une remarque toutefois, les zones vulnérables (ZV) couvrent la majorité des zones de production agricoles en France.
En effet, si le sol restait nu pendant une longue période, il serait soumis aux phénomènes d’érosion et de lixiviation. Ce premier phénomène correspond au charriage de particule de sol par l'action du vent ou des eaux. Le second phénomène correspond à la migration de l’azote dans le sol, une fois solubilisé dans l’eau. Pour pallier cela, des couverts peuvent être implantés ; ils sont alors nommés Cultures Intermédiaires Pièges à Nitrates (CIPAN). Cette directive européenne a pour but de garantir une bonne qualité des eaux. Sachant que les bienfaits des couverts végétaux sont nombreux, il est intéressant pour l’écosystème agricole d’instaurer des couverts allant au-delà de ceux réglementaires. En interculture courte, les couverts végétaux ne sont pas obligatoires. Ils restent néanmoins un levier agronomique intéressant puisqu’ils permettent notamment de stocker du carbone dans les sols agricoles et ainsi de restaurer la vie du sol.
Les couverts végétaux présentent de nombreux intérêts pour la fertilité du sol et le développement de la culture suivante.
Les couverts végétaux permettent de rendre disponible des éléments importants (azote, phosphore, potassium, soufre) à la croissance de la culture suivante récoltée. Par exemple, les légumineuses sont des plantes qui absorbent le diazote atmosphérique (présent à 79% dans l’air) et le transforment en azote minérale disponible pour la plante (sous la forme d’ion ammonium NH4+). Cela est possible dans les nodosités racinaires de la légumineuse. Ces nodosités se développent uniquement grâce à une relation symbiotique réalisée avec une bactérie présente naturellement dans le sol, le Rhizobium. Ainsi après un couvert végétal de légumineuses, l'apport d'engrais azoté nécessaire est plus faible voir nul (dans de cas spécifiques) pour la culture suivante. Cela revient à un gain économique pour l’agriculteur mais aussi préserve la biodiversité en évitant de dégrader la qualité de l’eau causée par l'ajout de fertilisant azoté (le phénomène de lixiviation des nitrates évoqué plus haut).
Couvrir les sols agricoles entre deux cultures principales (dites culture « de rente ») permet de limiter leur érosion. Une terre nue, sans végétal, est sensible aux vents, pluies ou ruissellements des eaux. Des particules de sols agricoles peuvent être charriées dans les eaux. Ce phénomène est ainsi une source de déstockage de carbone et de perte de fertilité des sols. Le couvert végétal permet donc de se protéger du déstockage, en plus de lui aussi stocker du carbone.
👉Pour en savoir plus sur l'érosion des sols consultez notre article
La présence d’un couvert végétal sur le sol permet de stocker du carbone dans les sols agricoles. En effet, les plantes réalisent le phénomène de photosynthèse. A partir de dioxyde de carbone (CO2), d’eau et d’énergie solaire (lumineuse), le végétal créé du dioxygène et du glucide, nécessaire à son fonctionnement. C’est par cette réaction que la plante stocke du carbone en gagnant en biomasse. Le carbone est par la suite stocké dans le sol via trois phénomènes.
AInsi, plus un couvert est développé et produit de la biomasse (cela étant impacté par la durée d’implantation sur le champ, et les conditions climatiques) , plus il piégera du carbone par le fonctionnement de son métabolisme. Ce phénomène est accentué par l’implantation d’un couvert multi-espèces. L’agriculteur est ainsi assuré qu’au moins l’une des espèces du couvert lève et que les effets positifs de chacune des espèces se potentialisent. Enfin, en gagnant en biomasse le couvert limite l’implantation d’adventices. Cela permet ainsi de réduire l’utilisant de produits phytosanitaires.
Les racines des couverts végétaux ont une action sur la structure du sol. Le système racinaire fasciculée des graminées par exemple améliorent la structure du sol. Le réseau ramifié de racine permet aussi une meilleur infiltration et rétention d’eau. Le système racinaire pivot permet quant à lui de décompacter le sol en profondeur. Il est particulièrement intéressant dans un sol qui a été compacté par le travail du sol des machines agricoles ou le surpâturage par des animaux.
Les couverts multi-espèces ont également la particularité de casser le cycle des maladies des cultures récoltées. Par exemple, entre la récolte de blé et le semis de triticale, deux cultures de la famille des Poacées, il est pertinent de faire lever un couvert de moutarde et de féverole, couvert de la famille des crucifères et des légumineuses. Cela permet d’éviter le développement de maladies et d’adventices (appelés communément des mauvaises herbes) spécifiques aux Poacées. Ainsi, le couvert est un levier de lutte biologique, qui limite l’utilisation de produits phytosanitaires (pesticides) par l’agriculteur.
Pour préserve la biodiversité au sein de l’écosystème agricole, les caractéristiques des fleurs développées par les couverts sont à étudier. Certaines fleurs produisent une quantité suffisante de nectar ainsi que du pollen de bonne qualité et accessible aux abeilles ; ce sont des plantes mellifères. C’est notamment le cas, par exemple, pour la moutarde blanche, le trèfle blanc ou la phacélie.
Pour choisir le couvert à semer, l’agriculteur prend en compte les externalités positives désirées (restauration de la biodiversité, structuration du sol, fertilisation de la culture suivante, rupture du cycle des maladies, …) comme vu plus haut. Il prend en compte également la durée d’interculture pour choisir par exemple un couvert à développement rapide en interculture courte.
Une fois que le choix des espèces du couvert est réalisé, reste à savoir quand semer. Si les conditions climatiques sont favorables, plus le couvert est semé tôt et plus il est détruit tardivement, plus le végétal aura produit de biomasse et stocké de carbone. Il est donc souvent conseillé de semer le couvert directement après la récolte de la culture précédente, pour également profiter de l’humidité résiduelle du sol. Semer après la moisson est possible sous réserve qu’il pleuve dans les jours qui suivent l’opération pour permettre la levée du couvert.
La destruction ne doit pas se faire trop tardivement pour ne pas pénaliser la culture suivante, afin de conserver la disponibilité en eau, en éléments nutritifs et la bonne structure du sol. Pour les espèces gélives, à savoir sensible au froid, un moyen naturel de destruction est d’attendre les premières gelées. Pour les autres, le passage d’un outil de travail du sol (déchaumeur ou d’un broyeur) représente une solution mécanique qui est aussi une alternative à l’utilisation d’herbicide.
ReSoil a identifié trois principaux freins qui limitent le développement de couverts végétaux par les agriculteurs.
Un des freins au changement reste le coût que représente l'implantation d'un couvert végétal. Celui-ci n'étant pas récolté on le rappelle. D’après les recherches de l’institut Arvalis, bien penser le choix de son couvert, notamment avec des légumineuses permet de réaliser des économies d’azote pour la culture intermédiaire et la culture suivante. Cela compenserait en partie les coûts de semences ainsi que les charges de mécanisation liées à l’implantation et la destruction du couvert. Ainsi, un choix réfléchi de culture intermédiaire permet des gains économiques à l’échelle du système agricole.
Un dernier frein à l’insertion des couverts végétaux dans la rotation est le manque de temps nécessaire au travail du couvert (implantation, destruction). Néanmoins, le temps consacré à l’interculture représente une économie de temps pour la culture suivante (travail du sol pour la restructuration du sol ou les apports d’engrais).
Implanter le bon couvert végétal, au bon moment, de la bonne manière est une tâche complexe puisque les choix des couverts et de travail du sol se font en fonction de paramètres multiples (climatique, pédologique, choix des externalités positives désirées). Cela nécessite alors de nombreuses connaissances. Ces dernières représentent un frein pour certains agriculteurs, car se renseigner ou réaliser des tests demande du temps.
Sur ce point, ReSoil accompagne agronomiquement les agriculteurs et agricultrices français qui s’engagent dans une démarche de transition agricole bas-carbone sur leur exploitation. L’un des plus gros leviers pour que les sols agricoles français deviennent des puits de carbone reste l’implantation de couverts végétaux. L'INRAE rappelle que les moyens d’action consistent à implanter des couverts, augmenter leur fréquence dans la rotation ou retarder leur destruction. D’après une étude réalisée en 2019 par l’INRAE et l’ADEME, la surface totale concernée par l’un de ses trois moyens, appelée assiette maximale technique, est de 16 Mha soit 60% de la surface agricole utile (SAU) française. L’implantation et l’allongement de ces cultures intermédiaires permettraient alors un stockage de 7 Mt CO2e/an.
👉 Pour en apprendre plus sur les puits de carbone, leur diversité et leur importance, consultez notre article à ce sujet.
La mission de ReSoil est de favoriser la transition vers une agriculture durable pour la planète, d’apporter des solutions viables économiquement pour les agriculteurs et des solutions comprises par tous en reconnectant le monde agricole et celui des entreprises.
L’offre de ReSoil s’inscrit dans la démarche du Label bas-carbone, en accompagnant les agriculteurs et agricultrices qui s’engagent à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre et à stocker de carbone dans les sols. Via le Label bas-carbone ReSoil permet aux agriculteurs de faire labelliser leur projet de transition agricole et d’être rémunérés pour les externalités positives engendrées cela permettant de couvrir partiellement ou totalement le coût de leur transition bas-carbone. Et pour cette transition les couverts végétaux représentent le principal levier de stockage de carbone dans les sols agricoles
Concrètement ReSoil accompagne les agriculteurs dès le diagnostic carbone pour mesurer l'impact climat de l’implantation de couverts sur leur exploitation en passant par un accompagnement agronomique. ReSoil les informe techniquement sur les espèces à choisir en fonction de leurs objectifs, et les conseille sur les modalités d’implantation et de destruction. Pour leur permettre de financer ce changement de pratique ReSoil apporte un financement aux agriculteurs via le Label bas-carbone et la revente des crédits carbone générés par le projet de l'agriculteur à des entreprises présentes en France. Ces dernières sont soit (i) des entreprises de tous secteurs qui font cela dans le cadre de leur démarche RSE (responsabilité sociétale des entreprises) tout en ayant en parallèle une réelle stratégie de réductions de leurs émissions (un des critères d'éligibilité défini par ReSoil), soit (ii) des entreprises du secteur agroalimentaire désireuses de financer la transition de leurs agriculteurs fournisseurs pour réduire leur scope 3 amont agricole.
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